CKIArt
Photo : Valérie Remise
Par Christel Mafalanka
Réflexion à trois voix sur la responsabilité individuelle
et collective, la pièce Les Hardings, est présentée au théâtre La Bordée
jusqu’à ce samedi 7 décembre. Les représentations reprendront ensuite à
Montréal au théâtre Duceppe du 15 janvier au 15 février 2020 puis en tournée
québécoise. Dédiée aux survivants de la tragédie de Lac-Mégantic, la
pièce nous rappelle à notre devoir de mémoire.
Trois hommes sur scène. Un cheminot québécois
(Bruno Marcil), un chercheur néo-zélandais (Patrice Dubois) et un assureur
américain spécialisé dans les compagnies pétrolières (Martin Drainville). Tous
trois portent le même nom : Thomas Hardings. Quelles étaient les chances
pour qu’ils se retrouvent ensemble au même moment ? Presque autant que les
chances pour que tous les ingrédients d’une catastrophe industrielle soient réunis.
La catastrophe, c’est celle de Lac-Mégantic,
la nuit du 6 juillet 2013. C’est autour des évènements de cette nuit qu’Alexia Bürger, auteure et metteuse en scène, a orchestré
une « rencontre fictive entre trois hommes aux existences réelles ». Alors
que la municipalité de Lac-Mégantic vient d’exploser, Alexia Bürger aperçoit à
la télé le visage de Thomas Hardings, le conducteur du train transportant le
pétrole à l’origine de l’explosion.
Elle recherche alors son nom dans un moteur de recherche et s’aperçoit qu’il existe plusieurs Thomas Hardings. Après un important travail de documentation, la rencontre des homonymes a lieu sur scène. Notons que le choix des deux autres Thomas Hardings n’est pas anodin. L’assureur est spécialisé en pétrolière et le chercheur partage curieusement une histoire commune avec le cheminot.
Les Hardings nous font le récit
de la responsabilité, de la culpabilité et des choix que nous faisons. Chaque
personnage éclaire l’histoire de l’autre et les consciences se parlent. L’assureur
apporte un regard rationnel, rappelant les aspects juridiques et techniques,
tandis que le chercheur partage une approche plus sensible et morale.
Alexia Bürger fait dans cette
pièce une critique acerbe de la société. Elle nous tend un miroir triptyque des
systèmes qui déraillent, mais que nous acceptons. Car de Tchernobyl à
Lac-Mégantic en passant par Fukushima, il s’agit toujours la même histoire. Une
histoire de risques calculés, de négligences passées sous silence, de dysfonctionnements
et de profits.
Qu’en est-il de notre
responsabilité collective et individuelle ? Comment identifier un coupable ?
Comment vivre avec la culpabilité ?
Les Hardings tentent de
répondre à ces questions avec des répliques percutantes, un décor métallique et
des train songs rappelant l’importance du chemin de fer dans l’histoire nord-américaine.