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Actualité

Entrevues

Viktoria Miojevic, un nom singulier que les auditeur.trice.s de la radio généraliste et progressiste CKIA peuvent entendre tous les matins dans la matinale Québec, réveille! La journaliste y présente la revue de presse. Celle qui n'a pas craint poser une question dérangeante sur le port de Québec au maire sortant Régis Labeaume, a accepté de répondre à nos questions sur son parcours et sa profession.



CKIA : Entre le jour où vous avez décidé d'être journaliste et celui où vous avez pratiqué, qu'est-ce qui vous a le plus surpris de la profession?


Il y a quelques années, j'envisageais le rôle de la profession comme celui de "tout savoir". Je pensais qu'on devait juste être partout, en tout temps. En réalité c'est impossible, l'essentiel consiste à sélectionner en permanence et trouver des manières de transmettre des informations complexes rapidement puis de la manière la plus claire possible. Être journaliste c'est aussi s'adapter en permanence, je ne peux pas deviner ce qu'il se passera demain alors mon rôle est de me préparer, au quotidien, sur le plus de sujets possibles, que ce soit du point de vue de la recherche scientifique ou de communiquer avec des gens sur le terrain. Aussi, j'ai eu le plaisir de découvrir que les gens échangent énormément et facilement avec les journalistes. Finalement, tout le monde à quelque chose à nous raconter, une histoire, un vécu ou des expériences difficiles. Parfois c'est triste de voir que les gens sous-estiment la portée de leur vécu alors c'est notre rôle de trouver le bon angle, le bon format, pour partager ces réalités avec le plus grand nombre. 


CKIA : Quels sont les sujets que vous jugez peu ou pas assez couverts dans les médias?


Je dirais d'abord les inégalités sociales. Concrètement, on aborde encore trop peu les réalités des personnes marginalisées à moins de rapports d'ONG ou des gouvernements. Il n'a pas assez de journalistes sur le terrain pour comprendre la précarité, la marginalisation des communautés et mesurer ses impacts sur le quotidien. Évidemment, les changements climatiques sont un sujet qui passe souvent sous le radar car c'est toujours difficile de parler de quelque chose que l'on ne "voit" pas. Les changements climatiques sont une réalité insidieuse qui demande de toujours décomposer notre perception. Là aussi, il y a trop peu de journalistes scientifiques pour rythmer le beat de l'information généraliste. Les identités de genre sont un sujet plus souvent évoqués sur les réseaux sociaux que dans les médias et quand c'est le cas, les médias passent souvent à côté. Néanmoins, des médias comme CKIA, Ricochet, La Converse, Unpoinctcinq, The Pigeon ou The Rover viennent changer la donne.  Je vais m'adresser aux lecteurs, si des sujets vous intéressent ou vous touchent, contactez les journalistes, n'hésitez pas, on travaille pour vous.  


CKIA : Qu'est-ce qu'être une journaliste à l'ère du complotisme qui progresse et s'immisce partout et à grande vitesse?


Le complotisme de personnalités qui abusent de leur pouvoir, comme avec l'affaire du Watergate, ça a existé et ça existera toujours mais ce qui progresse aujourd'hui ce sont les théories du complot, des théories sans information rigoureusement vérifiée par des professionnels. Des études ont aussi montré qu'on a toujours propagé des théories du complot, la différence c'est l'intensité. Les médias socionumériques et le web amplifient nos pratiques sociales de la 'vraie vie'. La manière dont je vois mon rôle, c'est juste d'essayer d'être encore plus rigoureuse pour apporter une garantie sur la qualité de mon travail et préserver la relation de confiance avec les gens. Aussi, je m'informe sur ces théories du complot pour comprendre leurs mécanismes et éviter que des nouvelles que je raconte puissent être interprétées différemment ou détournées. Alors je dirais, être une journaliste dans un monde de l'information (et politique) plus complexe c'est essayer d'être la meilleure journaliste possible pour les gens, en étant présente pour répondre à leurs questions. 


CKIA : Longtemps regardée avec mépris, l'actualité locale est aujourd'hui courtisée par tous les médias. Quel regard portez-vous sur l'information de proximité ?


C'est essentiel, on peut pas faire de l'information en circuit clos dans des centres urbains. Les gens se sentent souvent abandonnés par les médias car ils ne voient plus trop les journalistes. Je les comprends. Si je commence mon parcours avec de l'actualité hyperlocale c'est que j'ai envie de recréer ce dialogue avec nos auditeurs. La sphère politique municipale a un gros pouvoir d'action sur nos réalités, notre quotidien, alors il faut veiller, en permanence, à ce que tout le monde soit informé pour pouvoir prendre les meilleures décisions possibles. Je pense que le contact avec les gens manque aux journalistes. L'arrivée d'internet a fait baisser les revenus des médias et donc le nombre de reporters sur le terrain. Les meilleures infos sont celles qui viennent des discussions informelles et d'un échange en toute confiance. Personnellement, j'aimerais que le journalisme d'enquête se développe encore plus à l'échelle locale. Aussi, j'aimerais qu'on fasse plus de liens entre les régions du Québec ou la côte Est/ côte Ouest du Canada. Souvent ce qui se passe chez nous résonne avec des réalités plus éloignées. 


CKIA : Pandémie, élections municipales, probables élections fédérales... sur quoi va se porter votre intérêt dans les prochaines semaines?


Ça y est, il faut que je donne mes petits secrets. Pour la pandémie je veille sur la deuxième vaccination, le déconfinement, la santé mentale, les brevets et aussi les rapports, enquêtes, qui vont chercher les responsables des défaillances dans la gestion de la pandémie. À mon avis, au Québec, comme en France, il y a eu des occasions manquées pour sauver des vies même si les crises restent toujours peu prévisibles. Concernant les élections, j'analyse les échiquiers politiques et les promesses de campagne mais aussi les stratégies de communication. J'ai l'impression que l'économie, la santé, les transports et les changements climatiques vont être les gros dossiers à suivre. Avec l'été qui arrive, j'ai aussi envie de couvrir des sujets plus culturels, des évènements, pour venir aérer un peu cette année bien difficile pour tout le monde. Faire de la bonne info, c'est aussi trouver des moments pour laisser le temps à tout le monde de reprendre son souffle et mieux repartir. 


Retrouvez Viktoria Miojevic tous les matins dans Québec, réveille! de 7h30 à 9h00 sur CKIA 88.3 FM - CKIAFM.ORG - APPLI CKIA


 
 

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